Texte d'Henri Affre Archiviste

Fonds Joseph Vaylet Espalion

Henri AFFRE (janvier 1816 - juillet 1907) était archiviste départemental, historien régionaliste du Rouergue et héraldiste.

Il fut archiviste de la ville d'Espalion, puis aux archives départementales de l'Aveyron et membre du comité des travaux historiques et scientifiques. Il écrit  "lettre à mes neveux" en 1858, un livre qui décrit les différents sites de l’arrondissement d'Espalion et entre autres, le site de Cohulet

"Cogulet (Coguiolet, Coguioleto en latin)

Une modeste église et son presbytère plus modeste encore composent tout Cogulet, qu'on ne découvre qu'en cherchant bien, de même que s'il s’agissait d'une épingle perdue. Je ne connais pas en vérité de position plus cachée que la sienne. Son emplacement fait présumer que l'époque de sa fondation tenait un peu de celle où les chrétiens, traqués de toute part à l'égal des bêtes fauves, ne pouvaient  offrir l'encens de leur prière au très-haut  que dans les cryptes et les Catacombes. Cependant ne plaignez pas trop les deux hommes qu'une vocation sainte fixe pour la vie en cet endroit : la solitude a des douceurs et ses paisibles plaisirs valent mieux que le fracas du monde. D'ailleurs celle dont je vous parle n'est pas de ces solitudes qui impriment je ne sais quel air triste et funeste : là murmure doucement à l'oreille le petit ruisseau de la Fous; là, ramagent, du matin au soir, durant de longs mois, la fauvette et le rossignol, le pinson et le chardonneret, aux concerts desquels se mêlent par intervalles la grive et le merle, le coucou timide et le gentil roitelet; là, les soins d’un jardin à plantes variées sont une source d'ineffables jouissances; là, d'innocentes réunions fraternelles, auxquelles le lièvre savoureux et la chapon de pailler, bien préférable à celui du Mans, ne font pas toujours défaut, et où règne infailliblement, quelle que soit la fortune du pot, la plus franche cordialité; là enfin les suaves consolations de l'apostolat s'exerçant au milieu d'un troupeau fidèle, plein d'affection et de prévenances pour ces dignes pasteurs.

Le prieuré-cure de Cogulet dépendait des religieux bénédictins de la Chaise-Dieu au diocèse de Saint Flour. Il y a trois siècles, mes amis, certaines personnes affirmaient que c'était un bénéfice régulier; d'autres soutenaient le contraire; un arrêt de l'année 1613 fit cesser cette diversité d'opinions, cause de plusieurs procès, en décidant que le bénéfice de Cogulet était d'habitude tenu séculièrement. Celui qui en était pourvu, sur la présentation du prieur de la Chaise-Dieu, n'était pas le plus malheureux de la paroisse; car outre d'assez belles réserves, outre 24 coupes de froment qui revenaient annuellement aux religieux déjà nommés, il en retirait, en 1681, huit cent livres tournois et une barrique de bon vin clairet ou rouge.

L'église n'offre aucune particularité digne de remarque. Le seul fait qui s'y rapporte nous a été transmis par un de ses anciens vicaires du nom de Viguié, le voici :

" En ce mois de mai 1709, notre église de Cogulet fut blanchie et peinte, le retable doré au zèle et dépens de Messire Jean-Baptiste Ayral, prieur, vicaire général et official de Mgr. de Lusignen. C'est l'année ou la gelée de l'hiver emporta nos arbres, les vignes et réduisit ce pays à une extrême misère."

Saint-Saturnin, vulgairement Saint- Sernin, est le patron de la paroisse. on y honore également d'une manière particulière Saint Loup, dont les fidèles implorèrent il y a bien longtemps la protection à l'occasion de quelque grande calamité publique